Le chemin de l'école Dans un village, au bord du chemin, sur un banc, Grave sous sa pelisse et son haut bonnet blanc, Une vieille, qui rêve au soleil, est assise; Auprès d'elle, une enfant l'examine, indécise, Et semble ruminer au fond de son cerveau Quelque dessein profond, téméraire et nouveau. Elle vire alentour, se consulte, s'arrête, Hésite encore; enfin, hochant sa jeune tête, Elle avance, et d'un air assuré, bravement, La tirant par la manche et par le vêtement : « Grand'mère, lève-toi! - Que me veux-tu, petite? Dit l'aïeule, et pourquoi me lever? — Allons, vite, Reprit l'enfant, je veux t'emmener; il est tard! » La vieille sur l'enfant fixa son long regard, Et sourit: « Où veux-tu me conduire? - A l'école. - A l'école? - Oui, c'est dit. Tous les jours. - Es-tu folle? Que veux-tu que j'y fasse à mon âge? On dirait Que je tombe en enfance, et l'on se moquerait. Veux-tu qu'à mes dépens chacun s'en vienne rire? » Mais l'enfant : « Non, suis-moi. Je veux t'apprendre à lire. Je sais déjà, grand'mère, et ce n'est pas bien long. Je le veux. Viens. L'école est tout près. Pourquoi donc Les vieux n'y vont-ils pas, puisque c'est pour apprendre? » La femme regarda l'enfant sans la comprendre. Celle-ci tiraillait l'aïeule par le bras On épelle d'abord les lettres, - tu verras, - Sur de grands tableaux noirs, pendus à la muraille; Puis... - Mais je ne ferai, mon enfant, rien qui vaille. La mémoire me manque, et je n'ai plus mes yeux. Tu ne songes donc pas qu'ils se font déjà vieux! » Mais l'enfant, obstinée à sa sainte chimère, Sans vouloir de raisons, répétait: « Viens, grand'mère! » Et, tandis qu'une main l'attirait, l'autre main Montrait, d'un geste ardent et sacré; le chemin. O naïve ferveur! volonté magnanime! O des devoirs nouveaux pressentiment sublime! Oui, quand l'homme a besoin de ces enseignements, Les plus humbles d'esprit s'éveillent instruments. Toute main peut semer la graine salutaire; Et parfois l'on entend sortir, - touchant mystère! – Comme du ver luisant monte à nous la clarté, Des lèvres des petits la grande vérité. E. MANUEL. Vous entendez France Gall dans "Sacré Charlemagne" ~~~~~~ Merci de votre visite , à bientôt, pour m'écrire c'est... ici 00041398 le 17 juin 2013 - Graphisme et réalisation © Au jardin de Valentine |